Mutation psychosociétale et pédagogie, un point de vue anthropo-systémique par Jean-Paul Gaillard

Publié le mer 19 Oct 2016

Dans une société où prime le « Venez comme vous êtes », enseigner et apprendre dans un contexte favorable peuvent parfois constituer de véritables défis à relever. Les valeurs éducatives de la 3ème République dont nous avons hérité, qui ont placé « l’élève » sous l’autorité du « Maître », se heurtent aujourd’hui à des modes sociétales en pleine mutation.

Où est donc passé le temps où ces élèves buvaient les paroles de l’enseignant-e et où les cancres dormaient bien sagement au fond de la classe ? Désormais, ces étudiant-e-s « mutant-e-s » accros à leur portable ne sont plus motivé-e-s ni attentifs/ves. Et en plus, en un seul clic, ils/elles prennent un malin plaisir à dégainer la définition d’un terme avant même que l’enseignant-e ait pu articuler le 1er mot.
Dans sa conférence : « La pédagogie, dans le présent contexte de mutation sociétale », Jean-Paul Gaillard, a ainsi mis en lumière les pistes permettant de sortir d’une relation d’incompréhension voire conflictuelle avec les étudiant-e-s. Prisonnier-e-s de nos nostalgies nous nous entêtons et restons focalisé-e-s sur ces bonnes vieilles valeurs et méthodes qui, malgré nous, sont en train d’évoluer.

Ces valeurs et modèles qui nous font sens laissent désormais la place à des modes relationnels, émotionnels et sociétaux en émergence avec lesquels malheureusement aucune notice explicative n’a été livrée. En l’absence de repères, nous nous  sentons parfois  désœuvré-e-s : nous sommes déconnecté-e-s de la réalité de ces « mutant-e-s ». Face à des enfants mutants, individualisés, autonomes, Jean-Paul Gaillard nous définit comme des individus hétéronomes : véhicules fidèles et verticaux des savoirs et des valeurs.
Qualifié-e-s d’autonomes, les étudiant-e-s éprouvent le besoin de se sentir visibles. Il nous est donc parfois difficile d’adapter notre comportement par rapport à ce besoin qui constitue pour eux un « réel rituel d’existence inhérent » : ils/elles souhaitent co-produire des nouveaux savoirs et nouvelles valeurs en les manipulant et les articulant. Aussi, au lieu de vouloir pérenniser l’ancien cadre et subir les effets de ce nouveau cadre à notre insu, il nous faut redéfinir la relation Enseignant-Apprenant, co-construire de nouvelles relations de façon à s’inscrire dans une « horizontalisation de la hiérarchie en pédagogie ».

conf-gaillard

Une « pédagogie d’initiative et d’expérimentation fondée sur la co-production d’un savoir personnel, sans cesse négociée avec les savoirs existants », voilà qui semble être la clef de la réussite des étudiant-e-s et de l’épanouissement professionnel des enseignant-e-s.
Adopter une perception et une sensibilité nouvelles des méthodes : faire évoluer ses pratiques pédagogiques, rendre les étudiant-e-s acteurs et actrices de leur apprentissage, les faire participer à la construction de leur savoirs par des formes de pédagogie active, autant de pistes qui pourront aider enseignant-e-s et étudiant-e-s à évoluer ensemble.

Comme l’a conclu M. Gaillard, dans l’univers mutant, on ne peut pas apprendre s’il n’y a pas de plaisir à apprendre ! Et un enseignant en mutation … ne peut-il enseigner que s’il prend plaisir à enseigner ?

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