Soutenance de thèse de Jim FELIX FAURE

12 décembre 2018 14:00

Le mercredi 12 décembre 2018, Jim FELIX FAURE, doctorant en biodiversité, écologie, environnement au Centre Alpin de Recherche sur les réseaux Trophiques des Écosystèmes Limniques (CARRTEL), soutiendra sa thèse « Devenir des sols ennoyés sous les réservoirs de barrage. Effets sur la sédimentation et l’écologie des plans d’eau ».

La soutenance se tiendra à 14h, dans l’Amphithéâtre 1 de l’IUT de Chambéry , sur le campus du Bourget-du-Lac.

Résumé de la thèse

A l’échelle mondiale, les retenues de barrage couvrent environ 0,26.106 km2. Leur remplissage transforme des écosystèmes terrestres en écosystèmes aquatiques et occasionne des modifications majeures des cycles biogéochimiques à l’échelle locale et à l’échelle globale. Cette thèse s’intéresse à l’évolution des sols ennoyés par les réservoirs de barrage et à l’influence de ces sols sur les flux sédimentaires, le statut trophique et les émissions de gaz à effet de serre des réservoirs. Trois sites ont été étudiés afin de cerner ces différents aspects: deux grandes retenues mésotrophes de moyenne montagne (Sarrans, 1934, Massif Central) et de plaine (Guerlédan, 1931, Bretagne) et un petit lac subalpin oligotrophe modifié pour la production hydro-électrique (Corne, 1976, Alpes du Nord).
L’utilisation hydro-électrique conduit à un marnage saisonnier, qui conditionne une érosion accrue des sols dans la zone de marnage et un transfert de ces matériaux au plan d’eau. A Sarrans, l’érosion des sols de la zone de marnage annuel contribue à environ un tiers de la masse totale de sédiment accumulée depuis la mise en eau. Dans le petit lac modifié de Corne, l’analyse des sédiments montre, l’arrivée d’un flux d’abord organique puis progressivement minéral provenant des sols de la zone de marnage, et l’épuisement de ce flux au bout d’une quarantaine d’années. Ces flux de matière devraient donc être pris en compte pour les calculs d’accumulation sédimentaire dans les retenues.
Dans la zone toujours en eau, les sols évoluent dans un milieu hypoxique et sont peu à peu recouverts de sédiments. A Guerlédan comme à Sarrans, l’analyse morphologique et géochimique des sols noyés en permanence montre des sols de couleur terne, mais dans lesquels on distingue encore les horizons pédologiques d’origine. Leur pH s’est élevé au contact de la masse d’eau. Les horizons spodiques de podzols ont perdu l’essentiel de leur fer amorphe, tandis que leur teneur en Al amorphe a peu évoluée. Quatre-vingt ans après la mise en eau, ces sols ont perdu entre 40% et 50% de leur stock de carbone et azote d’origine. Ce flux de carbone, s’il est libéré sous forme de CO2 ou CH4, peut quantitativement expliquer l’essentiel du pic d’émission de GES des retenues après leur mise en eau. Les flux de carbone transféré au sédiment par érosion des sols de la zone de marnage, et potentiellement minéralisé dans la zone toujours en eau, doivent donc être déduits des bilans de stockage de carbone sédimentaire attribués traditionnellement aux retenues de barrages.
A Sarrans (et probablement Guerlédan), comparé aux flux entrants par l’affluent et turbinés en sortie du réservoir, le transfert vers la masse d’eau du carbone et de l’azote des sols de la zone de marnage ne semble pas suffisant pour alimenter un regain trophique consécutif à l’ennoiement ; sauf si l’érosion des sols de la zone de marnage annuel, et notamment des horizons organiques, opère rapidement après la mise en eau. Au lac de la Corne, l’approche paléo-limnologique indique que les flux de carbone du sol sont métabolisés par le lac. Les communautés microalgales montrent une élévation de l’état trophique du lac suivi d’une dépression progressive et confirment donc la théorie du « Trophic upsurge ».
Les retenues de barrage constituent des sites exceptionnels de mesure de l’évolution des sols noyés sur des périodes de temps variables et fournissent des archives précieuses des propriétés des sols du passé.