L’Université Savoie Mont Blanc distingue Yves Quinif, géochimiste et géologue du karst de renom

Publié le mer 4 Juil 2018

C’est à l’occasion du colloque Karst 2018, que Denis Varaschin, président de l’Université Savoie Mont Blanc (USMB) a remis une distinction de l’USMB à Yves Quinif, géochimiste et géologue du karst de l’Université de Mons pour sa contribution à la recherche en karstologie et pour ses collaborations porteuses avec les karstologues français et en particulier avec les chercheuses et chercheurs du laboratoire EDYTEM. Cette reconnaissance a permis de mettre en lumière la riche carrière d’Yves Quinif, avec des témoignages de Richard Maire, directeur de recherches émérite au CNRS, de Sophie Verheyden, chercheure Terre et histoire de la vie au service géologique de Belgique et de Laurent Bruxelles, chercheur à l’Institut national des recherches archéologiques préventives et à l’Institut français d’Afrique du Sud.

YVES QUINIF, UNE CARRIÈRE INTERNATIONALE

Après un doctorat en sciences chimiques, Yves Quinif soutient en 1973 une thèse annexe dans laquelle il démontre le rôle prédominant joué dans la spéléogenèse (le creusement des grottes) par la corrosion en zone épiphréatique. Ses premières publications dans les Annales de spéléologie s’appuient sur les observations faites dans les karsts de la région de Namur en Belgique.

Yves Quinif a eu plusieurs vies de spéléologue et de chercheur, marquées par 49 missions dans 10 pays différents (hors Belgique). Entre 1971 et 1979, il conduit sept expéditions dans le massif du Djurdura et dans le massif des Azérous, dont il tire la substance de 16 articles sur les karsts algériens dans les années qui suivront. Parallèlement, et dès 1978, apparait dans ses recherches un intérêt qui ne le quittera plus pour les remplissages souterrains, avec quelques articles fondateurs. En quelques mois, Yves Quinif passe de travaux sur des formations superficielles à l’amorce d’une recherche sur les radioéléments naturels dans les dépôts détritiques de grottes.

Les années 1980 le trouvent en Indonésie, au Zaïre, mais aussi de plus en plus souvent en France, et en particulier dans le massif de la Pierre Saint-Martin pour de riches collaborations avec Richard Maire. Sur la base de l’expérience acquise en géologie minière dans le domaine de la prospection des gisements d’uranium, il développe des compétences scientifiques et techniques qui lui permettent de conduire des avancées méthodologiques marquantes autour de la datation uranium-thorium des spéléothèmes. En s’appuyant sur sa très bonne connaissance des propriétés de l’uranium, il publie dès 1984, dans un compte rendu à l’Académie des sciences, ses premières datations des planchers stalagmitiques de la galerie Aranzadi. Même si les échantillons prélevés sont au-delà des limites de la méthode, cette innovation rend possible des datations en âge absolu là où les chercheurs devaient s’en tenir jusque-là à des datations relatives par la position stratigraphique des formations.

Il crée alors le CERAK, Centre d’études et de recherches appliquées au karst, adossé à l’université de Mons, et dirige la revue Speleochronos. Il multiplie les datations, prélevant des échantillons en Italie, en provence et bien sûr en Belgique. Il démontre aussi l’intérêt de ces datations pour les études paléoclimatiques et archéologiques, élargissant ainsi ses domaines d’intervention et son cercle de collaborations scientifiques.

À partir de 1991, il enseigne à la faculté polytechnique de Mons où il assure la charge de nombreux cours de géologie, de géophysique, de karstologie, mais aussi de géographie et d’économie minières. Il dirige huit thèses à Mons et à Bruxelles.

Dans les années 1990, Yves Quinif réoriente ses recherches et révise les conceptions classiques de la karstogenèse en élaborant au sein de son équipe la théorie de la fantômisation, qu’il développe jusqu’à la sortie en 2010 de l’ouvrage majeur, Fantômes de roche et fantômisation qu’il publie dans la collection des Karstologia Mémoires. Cette théorie de la fantômisation constitue aujourd’hui un nouveau paradigme qui alimente de nombreuses recherches en Belgique, en France et au-delà.

En parallèle à sa carrière d’enseignant, Yves Quinif s’est toujours attaché à la diffusion et à la valorisation des résultats de ses recherches : actif dans les organes de l’Union internationale de spéléologie, il est aussi administrateur de quatre associations sans but lucratif, dont le Laboratoire souterrain de la grotte de Lorette (anciennement grotte de Rochefort) et le Jardin géologique d’Obourg. 

LA CARRIÈRE INSPIRANTE D’YVES QUINIF

Yves Quinif a entretenu d’étroites relations de travail avec les karstologues français : il a participé à treize jurys de thèse en France, dont deux soutenues à l’Université Savoie Mont Blanc. Très attaché aux publications scientifiques francophones, il a donné vingt articles à la revue Karstologia, depuis le numéro 1 de la revue (1983) jusqu’aux actes du présent colloque (deux articles dans le n°69).

Tant par l’étude des sédiments souterrains que par les datations isotopiques et ses travaux sur la karstification par fantômisation, Yves Quinif a ouvert des voies de recherche importantes qui ont durablement renouvelé les conceptions et sur lesquelles se sont aujourd’hui engagées de jeunes générations de chercheurs.

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