Jouer pour comprendre l’impact de l’homme sur l’équilibre des animaux de nos montagnes

Publié le mer 11 Mar 2020

Anne Loison, chercheuse CNRS au Laboratoire d’Écologie Alpine (LECA), et ses étudiantes et étudiants ont imaginé un jeu de plateau pédagogique inédit, où chaque joueuse ou joueur est un chamois : « Défi Chamois ». Son défi : se préparer au mieux à passer l’hiver. Recherche de nourriture, fuite face aux prédateurs, rencontres imprévues avec des randonneurs, saison des amours, etc. À chaque tour, le joueur doit faire preuve de stratégie et de réactivité s’il souhaite passer la saison d’hiver et remporter la partie. L’objectif ? Sensibiliser le grand public aux impacts des activités humaines en montagne sur le chamois, et aux concepts fondamentaux de l’écologie évolutive des animaux sauvages.

« Le but est que le joueur rompt avec l’idée que seul le dérangement hivernal peut impacter la survie animale. En incarnant un chamois du début du printemps à la fin de l’automne, le joueur comprend que l’équilibre énergétique des animaux est fragile, et que le dérangement par l’homme, même à la « belle » saison, peut avoir des conséquences tant sur la survie de l’animal que sur sa capacité à se reproduire », explique Anne Loison.

Extrait du JT de France 3

Basé sur les connaissances scientifiques les plus récentes, obtenues par le laboratoire, avec l’aide de l’Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage, le jeu est également porté par le Parc Naturel Régional (PNR) du Massif des Bauges, qui apporte l’aspect pédagogique et ses compétences de vulgarisation scientifique. Le projet s’est concrétisé grâce aux financements du PNR du Massif des Bauges et au partenariat avec l’IUT de Chambéry et son DUT Métiers du multimédia et de l’internet, qui a missionné un groupe d’étudiants en 2ème année pour travailler les règles, suggérer des graphismes, monter une vidéo de présentation et proposer un livret de règles. Sur cette base, le PNR du massif des Bauges a sollicité Fanny Le Bagousse, illustratrice diplômée d’une maitrise en écologie, afin de finaliser le graphisme. Résultats : 25 boîtes test sont éditées et envoyées à l’essai dans différentes structures (Parc Naturel Régionaux et Nationaux, associations d’éducation à l’environnement, gîtes et refuges de montagnes et accompagnateurs en moyenne montagne).

Le jeu « Défi Chamois : l’hiver arrive » imaginé par le LECA

Le concept du jeu de plateau est de mettre en évidence le compromis « stratégique » mis en place par chaque individu, qui doit s’alimenter pour prendre du poids et faire des réserves de graisses, en limitant ses déplacements (pour éviter de perdre de l’énergie), tout en échappant aux risques potentiels auxquels il peut être confronté. Les décisions « stratégiques » prises par un individu du début du printemps à la fin de l’automne vont directement conditionner sa probabilité de survivre à l’hiver. Le jeu permet au joueur, qui incarne un chamois, de se déplacer sur un plateau qui représente un alpage de montagne sur lequel il peut trouver de la nourriture, mais qui est également fréquenté par divers pratiquants d’activités de montagne, des vaches, des prédateurs sauvages. L’enjeu est de donc de manger sans trop se déplacer, tout en faisant face à certains événements imprévisibles qui interviennent sur le plateau à chaque tour de jeu, et peuvent entrainer des pertes d’énergie : la rencontre avec un loup, un chien, des randonneurs. Le joueur gagne s’il arrive à accumuler assez d’énergie à l’entrée de l’hiver.

Un jeu à la recherche de son éditeur

Le jeu “Défi chamois” remporte beaucoup de succès à chaque Fête de la Science, mais il n’a toujours pas trouvé d’éditeur, pour profiter au plus grand nombre, porter le message dans les écoles, les refuges. L’objectif est d’éditer 1 000 à 1 500 exemplaires, de le distribuer plus largement au grand public, et de le traduire dans les langues de l’arc alpin.

À propos du Laboratoire d’Écologie Alpine (LECA)

Rattaché au CNRS, à l’Université Grenoble Alpes et à l’Université Savoie Mont Blanc, le LECA a pour objectif de comprendre le fonctionnement des écosystèmes et prédire leur réponse aux changements en utilisant des concepts et des méthodes issus de disciplines telles que l’écologie et la biologie évolutive. Pour cela, le laboratoire développe une recherche intégrée allant des mécanismes moléculaires de l’adaptation jusqu’à l’impact global de l’environnement physique sur le maintien de la biodiversité. L’équipe chambérienne s’intéresse en particulier aux réseaux d’interaction, aux mécanismes de coexistence et aux rôles fonctionnels des herbivores sur les écosystèmes de montagne, en interaction avec les communautés végétales.

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Contact : Anne Loison, chercheuse au LECA