La première édition du festival « Agir pour les glaciers » à Bourg-Saint-Maurice a eu lieu du 20 au 22 mars 2025. Réunissant chercheurs, citoyens et acteurs locaux, le festival a permis de réfléchir ensemble aux enjeux du retrait des glaciers. En plus des échanges scientifiques, l’événement a permis de concrétiser des engagements pour la protection des glaciers, notamment au niveau territorial. Partenaire institutionnel de l’événement, l’USMB a vu plusieurs de ses chercheurs participer activement aux débats et aux ateliers. Le président de l’université, Philippe Briand, était également présent et a introduit la seconde journée dédiée à la recherche-action.
Un festival entre science, art et engagement citoyen
Né du projet Ice&Life et du projet « ERABLE – Agir pour les glaciers » porté par l’USMB, ce festival éponyme sur une approche transversale mêlant science, art et engagement citoyen pour sensibiliser aux défis liés à la disparition des glaciers et à l’émergence de nouveaux écosystèmes et imaginer ensemble des solutions pour préserver ces milieux essentiels. Tables rondes, projections, spectacles, concerts et rencontres ont rythmé ces trois jours d’échanges riches en transmission de savoirs, mais également pensés comme des moments pour se redonner de la force afin de continuer à mener le combat pour l’atténuation du réchauffement climatique. L’un des objectifs du festival était également de discuter de la façon d’éclairer et d’émerveiller le grand public sur la beauté des objets étudiés par les scientifiques. Une démarche qui s’inscrit dans une véritable écologie de la beauté, invitant à redécouvrir et à préserver la fragilité de notre environnement.
Plusieurs chercheures et chercheurs de l’USMB, spécialistes des glaciers et/ou de problématiques connexes, ont été sollicités pour intervenir pendant la journée de recherche-action du vendredi. Philippe Briand, le président de l’USMB, était notamment présent pour introduire cette journée. L’USMB a la volonté de renforcer son impact sociétal ; le festival “Agir pour les glaciers” représente un exemple très parlant de ce que l’Université souhaite encourager : la création de moments de partage des sciences auprès de la société, afin de permettre des décisions éclairées, en lien avec des acteurs locaux (ici la ville de Bourg-Saint-Maurice). Il a également souligné le partenariat de la Fondation USMB, et l’implication de plusieurs laboratoires de l’Université : le laboratoire Environnements, Dynamiques et Territoires de la Montagne (EDYTEM), le Centre Alpin de Recherche sur les Réseaux Trophiques et Ecosystèmes Limniques (CARRTEL), ainsi que le Centre de Recherche en Droit Antoine Favre.
Comprendre les glaciers pour mieux agir
La seconde journée, dédiée à la recherche-action, a ainsi permis de dresser un état des lieux des glaciers en France et ailleurs. Le constat est sans appel : les glaciers fondent, à une vitesse qui ne fait que s’accroître, et cette fonte est liée à l’activité de l’homme. Paradoxalement, les glaciers sont nos meilleurs alliés pour atténuer le réchauffement climatique, et sont des véritables clés de voute du fonctionnement de la vie sur terre telle qu’on la connaît. S’ils disparaissent complètement, certaines fonctions ne seront plus assurées. Malgré ce constat alarmant, Jean-Baptiste Bosson, glaciologue et directeur de l’association marge sauvage à l’initiative du festival, refuse de baisser les bras :
“Il n’est pas trop tard pour sauver une partie des glaciers : si l’on respecte les accords de Paris, on peut encore sauver un tiers des glaciers menacés. On est très en retard, mais il faut quand même y aller.”
La nature, elle, a déjà commencé à prendre le pas. Le retrait glaciaire en cours laisse ainsi apparaître de nouveaux espaces que l’on nomme les marges glaciaires. Malgré des conditions environnementales extrêmes et fortement évolutives, cela n’empêche pas de nouveaux écosystèmes de se développer. Les lacs, mares et autres cours d’eau des marges glaciaires sont ainsi étudiés au CARRTEL, notamment par le chercheur Florent Arthaud, qui insiste sur l’importance d’un suivi sur le temps long de ces nouveaux écosystèmes pour pouvoir analyser et mieux détecter les signes de basculements. “À l’heure actuelle, on connait très peu de choses sur ces écosystèmes, alors dès qu’on les étudie, on fait de nouvelles découvertes” explique-t-il. Un enjeu de taille, puisque d’ici 2100, en fonction des scénarios climatiques, entre 50 000 et 230 000 lacs glaciaires devraient avoir émergés dans le monde entier.
Des pistes d’actions … et des engagements pris !
Adapter les pratiques des usagers de la montagne en réduisant progressivement certaines activités (comme le ski sur glacier), en incitant les stations à renoncer au damage et aux aménagements lourds sur les glaciers, au profit d’activités plus adaptées et de moments de sensibilisation et de contemplation de ces géants de glace, telles sont les préconisations faites par les scientifiques. Un appel entendu : le gestionnaire du domaine skiable des Arcs ADS Domaine de Montagne Les Arcs / Peisey-Vallandry a ainsi annoncé pendant le festival le démantèlement d’infrastructures liées au ski autour du glacier du Varet. L’équipementier sportif Millet a, quant à lui, dévoilé la création d’un fonds de dotation Millet pour les glaciers, destiné à soutenir les actions d’associations.
Autre solution largement évoquée pendant le festival : celle de faire des glaciers des “zones de protection forte” (ZPF). En déplacement à Bourg-Saint-Maurice à l’occasion de l’ouverture du festival, la ministre actuelle de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher a réitéré l’objectif du gouvernement de classer 100% des glaciers ZPF d’ici 2100. Concrètement, explique la ministre, “c’est une définition qui vise à limiter l’impact des pressions de pollution, mais aussi l’impact des pressions des activités humaines, de façon à préserver au maximum nos glaciers”. Autre engagement pris cette fois-ci par le maire de Bourg-Saint-Maurice, Guillaume Desrues : la création d’une convention territoriale pour les glaciers, sur le modèle de la convention nationale pour le climat, d’ici mai 2025.
Parmi les pistes émergentes de protection des glaciers, celle des communs fonciers a été évoquée par Julia Ambrosio, doctorante du CERDAF qui travaille au sein de la Chaire VALCOM, et par Marine Yzquierdo, de l’association “Notre affaire à tous”. Un mode de gestion ancestral qui donne un droit d’usage sur une ressource, sans devoir en avoir la propriété. Ce système pourrait permettre de mettre en place des « sentinelles de l’évolution du climat” et accroître l’engagement des habitants envers “leur territoire”. De manière plus large, le glaciologue Jean-Baptiste Bosson appelle à ne pas sous-estimer le rôle de pression que peuvent avoir les citoyens.
Un bilan positif pour ce premier festival, en accord avec les ambitions du projet ERABLE « Agir pour les glaciers », rappelés par l’enseignant-chercheur du CARRTEL Jean-Christophe Clément, porteur de ce projet :
Ce projet de Sciences-Actions doit permettre de contribuer à des changements transformateurs et ainsi de contribuer au débat sciences et société.
En savoir plus
- Contacts à l’USMB : Jean-Christophe Clément et Florent Arthaud
- Consulter le site du festival Agir pour les glaciers
- Consulter l’article sur le site de l’USMB à propos du programme ERABLE dont est issu le festival
- Consulter la synthèse dessinée de la journée de recherche-action du vendredi, par Solène Dargaud, facilitatrice graphique