Colloque scientifique en hommage au géologue Marc Tardy

Publié le mar 23 Oct 2018

Suite à la disparition en 2017 de Marc Tardy, professeur émérite à l’Université Savoie Mont Blanc (USMB), un colloque scientifique s’est déroulé cet automne à Chambéry, à la présidence de l’USMB.

Les collègues du Pr. Tardy, géologues et géophysiciens, ont souhaité rendre hommage à la fois à un grand scientifique et à un grand pédagogue, ayant consacré une vie professionnelle dense à la recherche, à la diffusion des connaissances en direction de l’enseignement, et à la formation à la recherche. Le titre de cette séance spécialisée de la Société Géologique de France – « Géodynamiques Caraïbes et Alpines : un hommage à Marc Tardy. De la Recherche à l’Enseignement » – désigne les deux domaines géographiques dans lesquels il a développé ses travaux.

UNE JOURNÉE DE CONFÉRENCE SALUANT LA CARRIÈRE ET L’ENGAGEMENT DE MARC TARDY

Plus d’une centaine de participantes et participants, sont venus de différentes régions de France, pour cette journée de conférences : universitaires, professeures et professeurs de Sciences de la Vie et de la Terre, étudiantes et étudiants. Parmi elles, beaucoup ont connu personnellement Marc Tardy : camarades de promotion de l’École Normale Supérieure de Saint-Cloud, collègues de l’Université Pierre et Marie Curie, collègues de l’USMB et plus particulièrement de l’Institut des Sciences de la Terre (ISTerre) auquel il appartenait, collègues impliqués dans la formation et le recrutement des enseignantes et enseignants du second degré, collègues conseillers au Ministère de l’Enseignement Supérieur, compagnons de missions de terrain et de campagnes océanographiques.

Trois de ses proches collègues, à Paris, à l’Université Grenoble-Alpes, à l’USMB, ont introduit les deux parties du colloque : avancées scientifiques en géodynamique de l’Arc Alpin et des Caraïbes, et présentation de nouvelles approches en géosciences à destination de l’enseignement en lycée. Ces trois interventions ont été l’occasion de souligner les différentes facettes des travaux de Marc Tardy.

René Blanchet, membre de l’Académie des Sciences et professeur émérite à l’Université de Nice-Sophia-Antipolis, a souligné les points forts des recherches menées par Marc Tardy et aussi son rôle dans la création et la fusion d’équipes pluridisciplinaires, et dans le rapprochement des Géosciences de Grenoble et de Chambéry. A été rappelé également le rôle de Marc Tardy dans des rapprochements internationaux, en particulier la direction d’un programme de coopération scientifique et universitaire (toutes disciplines confondues) avec l’Argentine, le Chili, et l’Uruguay.

Une meilleure liaison entre les recherches géologiques académiques et celles de l’industrie a aussi été soutenue par Marc Tardy, notamment par le biais de thèses co-dirigées. Georges Mascle, professeur émérite à l’Université Grenoble Alpes (UGA.) et ancien Directeur du Laboratoire de Géodynamique des Chaînes Alpines, a rappelé le travail mené conjointement avec Marc Tardy dans la préparation à l’agrégation des sciences de la vie et de la terre, et plus généralement tout l’investissement dans l’enseignement de la géologie. S’agissant de cet aspect, Thierry Villemin, actuel vice-président du Conseil d’Administration de l’USMB et professeur de géologie, a rappelé comment Marc Tardy, alors conseiller au Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche, avait aidé à la création d’un second cycle en géologie à l’USMB.

Quatre grands spécialistes ont présenté les dernières avancées scientifiques dans la connaissance de l’histoire et du fonctionnement actuel en termes de tectonique de plaques des deux grands domaines parcourus par Marc Tardy. Éric Calais (en photo ci-dessus), directeur du département des géosciences à l’École Normale Supérieure et membre de l’Académie des Sciences, a montré comment les multiples îles entourant la Mer Caraïbe se déplacent aujourd’hui entre l’Amérique du Nord, l’Amérique du Sud, et l’Atlantique, comment il mesure ces déplacements et quelles sont les conséquences en termes de risque sismique.

Bernard Mercier de Lépinay (en photo ci-dessous), chercheur CNRS, à l’Université de Nice-Sophia-Antipolis, est revenu sur une histoire « ancienne » (jusqu’à 120 millions d’années) complexe de ces mêmes régions.

Laurent Jolivet, professeur émérite à l’Université Pierre et Marie Curie et membre de l’Institut Universitaire de France, a montré ses dernières avancées dans la connaissance des relations mécaniques profondes entre les Pyrénées, les Alpes, le Golfe de Gascogne, et, plus généralement sous la Méditerranée occidentale.

Stéphane Guillot, directeur de l’Institut des Sciences de la Terre/ISTerre (UGA et USMB),chercheur CNRS, a détaillé les interprétations nouvelles issues conjointement de la géophysique et de la minéralogie. Il a rappelé le rôle fondamental de Marc Tardy dans le développement des programmes de recherche sur la connaissance des « racines » profondes de l’Arc Alpin.

Quatre collègues de l’ISTerre ont ensuite détaillé les approches modernes qu’ils développent pour appréhender soit les structures profondes des chaînes de montagne, soit les vitesses de surrection et d’érosion des massifs montagneux, soit encore pour mesurer des déplacement le long des failles et prévoir des éruptions volcaniques. L’auditoire a ainsi bénéficié des présentations faites par :

  • Anne Paul, directrice de recherche CNRS, physicienne (ISTerre U.G.A.) ;
  • Jean-Louis Mugnier, directeur de recherche CNRS, géologue (ISTerre USMB) ;
  • Riccardo Vassallo, maître de conférence, géologue (ISTerre USMB) ;
  • Jean Vandemeulebrouck, maître de conférence, géophysicien (ISTerre USMB).

Parmi les éléments qui ont fasciné l’auditoire, dans les différents exposés, citons : les spectaculaires visions de ce qui se passe à des centaines de kilomètres sous les Alpes, les Pyrénées, ou les Antilles ; comment la mesure au millimètres près de la position d’un point géodésique permet d’estimer le danger que représente une grande faille en termes de risque sismique, comme notamment à Haïti.

Plusieurs orateurs et oratrices ont souligné l’influence décisive des enseignements de Marc Tardy, notamment sur le terrain, sur leur choix de la discipline géologique. Par ailleurs, les résultats récents présentés ont montré que des hypothèses scientifiques émises il y a plus de vingt ans par Marc Tardy sont aujourd’hui vérifiées par de nouvelles techniques analytiques, démontrant ainsi la robustesse de ses observations et la justesse de ses interprétations. Tous les intervenants et intervenantes ont souligné, à côté de sa puissance de travail, les qualités humaines de Marc Tardy : intégration dans des groupes de chercheures et chercheurs, générosité dans le partage des idées, convivialité, diplomatie. En bref, une célébration scientifiquement riche, mais aussi conviviale et pleine d’émotion, d’une personnalité très appréciée et regrettée.

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