« En commun ! » : Le documentaire du Centre de recherche en droit Antoine Favre qui dépoussière le système ancestral des propriétés collectives

Publié le mar 22 Nov 2022 alpage lo section couchant

Le film documentaire « EN COMMUN ! La propriété collective à l’épreuve de la modernité » réalisé par les chercheurs du Centre de recherche en droit Antoine de l’USMB, Olivier Chavanon et Jean-François Joye, est disponible depuis le 10 octobre 2022 en libre accès sur la plateforme YouTube.

LES COMMUNAUX, DE TRÈS ANCIENS SYSTÈMES DE PROPRIÉTÉ

Le documentaire (libre de droit) est issu d’une recherche menée sur différents sites en France par une équipe pluridisciplinaire constituée au sein du Centre de recherche en droit Antoine Favre de l’université Savoie Mont Blanc dans le cadre du Projet COMON. Il aura nécessité au total quatre années de travail. A travers une pluralité d’entretiens et de témoignages, « En Commun ! » rend compte de l’évolution et du fonctionnement de propriétés collectives foncières ancestrales, également connues sous les termes de « communaux et aux dénominations différentes selon les régions (sections de communes, bourgeoisies, consortages, etc.) ».

« Quand j’en ai parlé à mes étudiants, jai défini les communs comme étant des systèmes de propriétés qui avaient traversé les âges et les siècles, qui demeuraient pourtant relativement méconnus »  explique Olivier Chavanon. D’un point de vue juridique, les communs se situent « entre le privé et le public, le personnel et le collectif. C’est une possession par une communauté d’habitants. Elle se matérialise par des droits d’usage qu’ont les gens sur des biens. Elle implique que chacun prenne soin de son territoire de vie » complète Jean-François Joye.

Avec ce film, les deux chercheurs suggèrent que la relecture de ces mécanismes anciens a une certaine utilité pour des usages modernes à l’heure où les défis à relever en matière sociale ou écologique sont nombreux.

MAINTENIR L’ESPACE DES POINTS DE VUE POUR OBTENIR UN FILM ÉQUILIBRÉ

Pour proposer un panorama de témoignages qui rende compte de la diversité des points de vue, les deux chercheurs se sont appuyés sur un corpus d’entretiens très dense. De  nombreux interlocuteurs ont en effet été rencontrés durant ces années de recherche, notamment dans les Alpes françaises et le Massif central. Ce recueil de parole est un matériau de recherche à part entière, complémentaire avec d’autres types de sources : archives, actes, etc. Les chercheurs ont cependant dû veiller à bien répartir les propos afin de ne pas produire un film univoque. Le sujet des « communs » suscite en effet des débats depuis quelques années. « On a ainsi interviewé à la fois des ayants droit, les « commoners » français, mais aussi des élus, des fonctionnaires, des chefs d’entreprise… On a veillé à montrer différents points de vue », ajoute Jean-François Joye.

LA CAMÉRA OU L’ŒIL DU CHERCHEUR

Les premiers entretiens ont commencé à être filmés en 2018 par Anouk Bonnemains, docteure en géographie recrutée sur le projet. Initialement, la captation vidéo était surtout conçue comme un moyen efficace de saisir un maximum de données sur les différents terrains d’enquête. Pour Olivier Chavanon, la caméra n’était alors ni plus ni moins que « l’œil et l’oreille du chercheur ». Progressivement, devant la richesse des entretiens, l’idée d’en faire un documentaire a fait son chemin.

« Il aurait été dommage de limiter la diffusion de ce contenu au milieu universitaire. Nous avons donc créé ce documentaire en cherchant à nous adresser à toutes les personnes susceptibles de s’intéresser au sujet, mais qui n’ont pas nécessairement l’énergie, ou l’envie, de lire le livre technique de 800 pages que nous avons par ailleurs produit », explique le juriste. « Il est essentiel que les connaissances produites au sein des laboratoires puissent être valorisées de façon plus large. »

LE FORMAT DU DOCUMENTAIRE, VECTEUR EFFICACE POUR PARLER DE LA RECHERCHE

En faisant ce choix du format documentaire, les deux chercheurs souhaitent montrer qu’il est possible de sortir du schéma classique des publications académiques en matière de diffusion et de valorisation de la recherche lorsque les sujets s’y prêtent. Le documentaire a d’ores et déjà été projeté auprès de différents publics non-universitaires afin de débattre du sujet. Il a également été diffusé lors de l’Assemblée des Communs et des Possibles de Grenoble ce mois-ci. Il trouvera également un écho à l’étranger puisque des pays comme l’Italie, la Suisse, l’Autriche, la Slovénie ou l’Écosse (pour ne citer qu’eux) sont concernés par des systèmes analogues de propriétés collectives. Une version en DVD va également être éditée, dans l’optique de toucher une population moins « connectée ». Le sujet des communs fonciers, éminemment moderne, semble également intéresser jusqu’au plus haut niveau de l’État, puisqu’un extrait du documentaire a été projeté au Sénat, à l’occasion d’un colloque placé sous le parrainage du Sénateur Pierre Ouzoulias et organisé avec le Centre de recherche en droit Antoine Favre.

1

EN SAVOIR PLUS

  • Articles sur les communs par Jean-François Joye :
    • « Territoires ruraux : et si on redécouvrait les vertus de la propriété collective ? » A retrouver sur le site de The Conversation
    • « Les « communs » : pourquoi cette utopie du partage revient dans l’air du temps » A retrouver sur le site de Marianne
  • Contact : Sophie Pardoën, chargée de communication du Centre de recherche en droit Antoine Favre